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Prohibition de la publicité sur les boissons alcooliques ? Réaction

Projet de réforme de la réglementation du commerce des boissons alcooliques

1- Publicité sur les boissons alcooliques

Le projet de réforme de la réglementation du commerce des boissons alcooliques, tel qu’annoncé dans le courrier adressé par Gaston Tong Sang à la FGC, apparaît comme extraordinairement rigoureux, et implique des conséquences importantes pour l’activité de nombreuses entreprises ainsi que sur l’économie.

Au moment où le pays soufre déjà considérablement, au plan économique, des conséquences de longs errements de la sphère politique, ce type de « réforme », qui semble inspirée par les tendances les plus rétrogrades, voire intégristes de la société, va avoir l’effet d’un « tsunami » économique, consécutif aux tremblements politiciens dont soufre le pays.

1-     Une interdiction de toute publicité directe, cela signifie l’interdiction d’avoir recours à tout média, que ce soit presse, radio, affichage, internet, et même enseignes, festons et devantures de magasins et d’établissements où l’on consomme de l’alcool, bars et restaurants, bref toute visibilité sur la voie publique, y compris sur les véhicules de livraison des distributeurs. Au sens large, cela peut aussi viser toute visibilité intérieure, dans les établissements de consommation !

2-     Une interdiction de toute publicité indirecte signifie l’impossibilité de parrainer, dans le cadre d’un partenariat, tout événement culturel, qu’il soit musical voire gastronomique. Fini l’invitation sur une radio par une marque de bière ou de spiritueux à une soirée festive où l’on se réunit pour danser et écouter de la musique ; fini l’annonce en presse (ou sur internet) d’une semaine gastronomique dans un restaurant ou un hôtel, et proposant la dégustation d’un vin ou d’un champagne réputés.

3-     Les conséquences de telles dispositions seraient considérables sur l’activité des sociétés d’import et de distribution, des bars, restaurants, mais aussi de tous les partenaires de ceux-ci : média et sociétés de publicité, avec toutes les activités de conception et de création des supports, décorateurs et peintres de véhicules. Des sociétés, qui emploient des centaines de professionnels aux activités diversifiées, seraient ainsi gravement affaiblies, voire menacées, et devraient inévitablement licencier du personnel… voire pour certaines mettre la clé sous la porte !

4-     Il est aussi remarquable qu’au moment où le pays traverse une crise économique et financière inédite, il envisage de se priver des ressources considérables qu’apportent au budget toutes ces entreprises, qui sont aussi, du fait du système fiscal local, des « collecteurs d’impôts ». Nos politiciens voudraient scier la branche sur laquelle ils sont assis qu’il ne s’y prendraient pas autrement : le plus grave c’est qu’ils cherchent  à entrainer les entreprises et leurs collaborateurs dans leur chute !

5-     Enfin, la réforme prévoit un étiquetage spécifique des bouteilles de boissons alcooliques portant un message sanitaire et spécifiant une interdiction de vente aux mineurs. Il faudrait que l’importateur de vin, de champagne, de spiritueux étiquette une à une chaque bouteille mise en vente en magasin ou servie dans un bar, ou bien présentée à la table d’un restaurant ! On se croirait soudain plongé au royaume wahhabite intégriste de sa majesté al Saoud !

6-     Avec l’interdiction totale, directe et indirecte, de toute communication sur les boissons alcooliques, la Polynésie va se positionner comme l’un des pays les plus « sombres » en matière de liberté de communication. Déjà identifié comme un « dark market » en ce domaine par de grandes marques internationales de boissons alcooliques, le pays va s’afficher publiquement comme  une « destination obscure » sur le marché international du tourisme. En avait-il besoin ? Nos politiciens veulent-ils transformer la Polynésie en « réserve » moyenâgeuse, dont l’attrait ne sera évident que pour les religieux et les sectes réactionnaires ? Ce type de décisions s’affiche plutôt comme une sorte de prise d’otage de toute la société effectué par un petit cercle politicien et religieux, devant l’incapacité des autorités à faire appliquer les dispositions en vigueur en matière de consommation d’alcool : consommation sur la voie publique, vente d’alcool aux mineurs. Une fuite en avant totalement démagogique !

7-     L’emble des importateurs et distributeurs de boissons alcooliques sont généralement engagés, avec les marques qu’ils représentent, dans une démarche active de « consommation responsable », impliquant le respect des réglementations en vigueur, notamment l’interdiction de vendre et de faire consommer à des mineurs ou à des femmes enceintes, l’interdiction de prendre le volant après avoir consommé, ou bien de boire en conduisant, la non consommation dans le cadre du travail ou d’une activité sportive, etc…. Heineken, par exemple, promeut un site spécifique et très détaillé sur ces thèmes : www.enjoyheinekenresponsibly.com

8-     Il serait bon que nos dirigeants politiques assument les responsabilités qui leur incombent, et qui incluent en particulier celle de faire appliquer et respecter rigoureusement les réglementations existantes, qui sont largement suffisantes.

9-     Il convient de souligner fermement que dans la situation actuelle extrêmement dégradée, rajouter des difficultés aux entreprises d’import, de distribution, de vente de boissons alcoolique,  et aux nombreux partenaires qui les entourent, va entraîner des conséquences très lourdes sur leurs finances et sur l’emploi, conséquences qui n’ont sans doute pas été suffisamment mesurées par ce projet, qui apparaît avant tout comme un affichage démagogique.

10-  Au lendemain de la publication du rapport de l’IEOM, qui souligne une dégradation prononcée et continue de l’économie, au lendemain de la publication du rapport de l’agence de notation Standard & Pooor’s, qui dégrade à nouveau la note de la Polynésie française, l’adoption de mesures réactionnaires telles que celles avancées par le président Tong Sang serait bien mal venue ! Notamment quand on considère que, dans le monde anglo-saxon du Pacifique sud dans lequel baigne la Polynésie française, la tendance est, à l’inverse, à la libéralisation et à la responsabilisation, non à la répression.

11- Les nombreuses entreprises concernées, et leurs collaborateurs, n’auront d’autre alternative que de se dresser contre ces dispositions d’un autre temps, et de résister par tous les moyens à leur disposition dans une démocratie. Car il s’agit aussi de faire respecter la liberté d’information et d’expression.

Jérôme Mainguet

Directeur commercial

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